L’Arbre-Monde déco n’encourage pas la production systématique d’objets neufs ; l’idée est de limiter le gaspillage de matières premières et la production de déchets. Cela valorise et fait perdurer le savoir-faire des hommes et non la production en masse, mi-industrialisation mi-exploitation.
S’accorder du temps pour créer de ses mains, conserver avec soin, utiliser avec plaisir, transmettre avec fierté ne devrait pas être un luxe.
Glaner
Cette pratique se rattache à une tradition rurale basée sur le bon sens. Cela consiste à ramasser dans les champs les épis qui ont échappé aux moissonneurs, à valoriser ce qui a été oublié. Une démarche guidée à la fois par la nécessité et par une démarche éco-responsable. Cela peut s’étendre à la recherche de végétaux qui pourront être mis en scène dans un intérieur ou même ponctuer un jardin.
Marauder
On pourrait associer la notion de chapardage à la maraude. Initialement, cela concernait plutôt le vol de denrées alimentaires, en particulier de fruits, légumes, volailles dans les champs et dans une ferme. Enfant, on me disait que tout ce qui dépasse du mur peut être cueilli. Je me souviens de mûres qui finissaient en confiture, de pommes tombées sur la route. Aujourd’hui les voisins cueillent les cerises qui dépassent de notre clôture avec notre bénédiction, à condition de ne pas casser les branches.
Le terme de maraude sociale est apparu avec, entre autres, la Fondation Abbé Pierre ou les Restos du Cœur. Elle permet d’apporter aux plus démunis du lien social et des denrées alimentaires.
Grand écart entre les villes et les campagnes ; en milieu rural, des initiatives se mettent en place pour récolter les fruits restés sur l’arbre, les partager entre récolteurs et propriétaires, les valoriser, les redistribuer.
Garder la maîtrise de son temps
Comment expliquer qu’on n’a plus le temps de cueillir ses fruits, de réparer un outil, de bricoler un bout d’étagère ?
On se fait kidnapper son temps.
En Île-de-France, passer deux heures chaque jour dans les transports en commun apparaît comme la norme. Au-delà de la fatigue générée, cela a des incidences directes sur son mode de vie : parer au plus pressé pour toutes les tâches quotidiennes d’approvisionnement et de fonctionnement du foyer. En vrac centres commerciaux, plats cuisinés, mobilier et déco standardisés. Des difficultés à dégager du temps pour les enfants et les anciens.
En réaction, le télétravail, les départs professionnels vers des horizons à taille humaine se développent, les circuits courts sont de plus en plus plébiscités, les modes d’alimentation évoluent.
Stocker
C’est facile car rares sont ceux qui ne sont pas accumulateurs. C’est le fameux syndrome du « au cas z’où ». Dans cette catégorie, on trouve les emballages, du bocal plus ou moins ancien aux caisses à vin en passant par les boites d’œufs qui font de si jolies lanternes. Les personnes les plus aguerries à cet exercice sont, sans nul doute, les maîtres et maîtresses des écoles.
Une petite touche de peinture, un alignement et le bois vient réchauffer cette salle de bains impersonnelle et froide.
Chiner
Bien sûr, les meubles se prêtent à l’exercice. Fouille dans les vieilles maisons de famille, encombrants, vide-grenier, dépôts-vente et brocantes sont les sources d’approvisionnement les plus évidentes. Mais quelquefois, en y regardant de plus près, son propre sous-sol regorge de potentiel. Un des objets les plus détourné est sans conteste la palette. A tel point qu’aujourd’hui des palettes sont commercialisées dans les supermarchés pour faire chez soi « genre brocante » mais en propre et sans effort. C’est passer à côté du plaisir de la chine.
Le plus simple à récupérer est le végétal. A la campagne, le long des chemins ou dans son propre jardin mais aussi en ville, dans les friches où la végétation reprend spectaculairement ses droits et crée quelquefois des merveilles d’optimisme. Le végétal peut être modeste ou spectaculaire. La feuille de Gunnera Manicata (en tête de l’article) atteint 1,40 m de large et crée un tableau unique de beauté et de simplicité. Les feuilles, les branches, les graminées se combinent avec toutes sortes de supports, de mises en scène.
Il faut tout de même quelquefois savoir se restreindre : trop gros, trop loin, trop protégé…
Mais on peut se faire plaisir avec plus simple. Un nid à base de fines branches de glycine côtoie une souris en papier mâché qui se cramponne à un pilon, oeuvre d’un artisan d’art exposant dans le Val d’Oise. Un support réalisé dans un morceau d’écorce d’if accueille une collection de bijoux.
Les vieilles planches de bois sont très précieuses par la patine qu’elles apportent aux intérieurs. Elles permettent d’improviser à peu de frais des meubles quelquefois un peu improbables. Mais qu’importe.
Le petit meuble est sans contexte la star des brocantes. Facile à intégrer dans son intérieur, polyvalent dans son usage, il ne nécessite quelquefois qu’un peu de ponçage et de vernis mat pour reprendre du service. Le choix des boutons reste la cerise sur le gâteau et, souvent, le plus gros de l’investissement. La mise en situation, la déco qui l’accompagne permet de jouer avec les couleurs et les thèmes, ici un peu d’exotisme, un bouquet du jardin et les incontournables bougies. Les objets vont par trois, les silhouettes se répondent, l’abat-jour fait un clin d’œil aux huttes. Le rose poudré (rose Cadillac sur le mur) sert de fil conducteur et apporte sa douceur. Un peu d’humour avec la girafe offerte par les cousins et le petit vase à oreilles acheté pour 1 euro l’été d’avant.
Aujourd’hui les jolies tasses collectées au fil des rencontres avec des potiers du coin y côtoient les verres en cristal gravé de l’arrière-grand-mère.
Attention à ne pas se laisser emporter par son enthousiasme. Le vendeur voulait se débarrasser de l’ensemble de la chambre à coucher : lit, armoire avec miroir, chevet, le tout pour une somme ridicule. Et pour cause : que faire d’un tel fatras ? Il a fallu être intraitable et ne repartir qu’avec le chevet aux pieds de clown. Après l’habituelle séance de ponçage, il a été décidé d’utiliser le même RAL (la même couleur) que pour les portes et fenêtres, histoire d’avoir un tout cohérent. Plusieurs essais ont été nécessaires pour trouver les bons boutons (c’est bien sûr subjectif). La référence à la lampe, l’allusion aux pieds de clown, le rose comme fil conducteur ont fait pencher la balance vers ces jolis globes trouvés sur le marché. Le marbre a été peint car trop daté mais comme la couleur tranchait de trop, une ardoise a été superposée, doublée de liège pour ne pas rayer le marbre. Et le mille-feuille a fini par convenir.
Aujourd’hui les bouteilles de digestifs ont trouvé place dans ce petit meuble qui remplit parfaitement son rôle de bout de canapé.
Les textiles ont aussi leurs adeptes et, pour qui s’y intéresse, de très belles affaires peuvent être réalisées. Plus modestement, il reste dans nos armoires des draps usés mais brodés, des rideaux imprimés, des jetés de lit, … Leurs couleurs fanées sont souvent pleines de charme et permettent de changer de décor à moindre frais. Ici une vigie pour chats qui, par sa couleur, a donné le ton à toute la maison.
Les différents équipements peuvent aussi être recyclés. Certains se sont spécialisés dans la récupération de matériaux de construction, de décoration extérieure mais aussi d’équipements comme les vieux radiateurs en fonte.
Mis bout à bout, on peut regrouper deux hôtels à insecte, l’un d’une jardinerie, l’autre réalisé avec une caisse de vin, une maquette de la Rotonde de Palladio posée sur un pied de sellette en fonte, deux vieux bancs plus ou moins retapés, plus ou moins solides, des coussins du commerce monogrammés au pochoir avec de la peinture pour textile, une tranche de chêne offerte par un forestier, de l’argenterie dénichée à prix défiant toute concurrence. Et on se retrouve avec un coin unique et cosy.
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Sinon, nous, on recycle aussi les chats ; on les adopte dans des refuges 🙂
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